Les Australiens caucasiens ont un taux de cancer de la peau plus élevé que toutes les autres populations de peau blanche dans le monde. À tel point que le cancer de la peau est en Australie une cause nationale. Et si l’explication était génétique ?
On a depuis longtemps observé que certains signes physiques sont associés à un risque élevé de développer un cancer de la peau : une peau claire, ayant tendance à brûler plutôt que bronzer, des yeux clairs, la présence d’un grand nombre de tâches de rousseurs ou de grains de beauté, des cheveux blonds ou roux,…
Cependant, les progrès de la génétique et la diminution du coût des tests ont permis de mettre en évidence un phénomène qui pourrait expliquer un risque élevé de cancer de la peau chez ces personnes de type « roux » : la présence, dans certaines familles, d’un variant du gène MC1R (gêne du récepteur à la mélanocortine de type 1), serait associée à une sensibilité accrue au soleil et à un risque élevé de cancer.
Ainsi, même si on n’est pas soi-même roux, on peut avoir dans ses ancêtres des roux qui nous ont transmis ce gène modifié et le risque accru de cancer de la peau qui va avec.
Or, ce sont les populations Européennes qui sont le plus fréquemment porteuses de ce gène modifié.
Et les Australiens dans tout ça ? Vivant à 15000 km de l’Europe, pourquoi seraient-ils eux aussi porteurs de ce gène modifié ?
L’explication est historique. Les habitants d’origine de l’Australie, les aborigènes, ont la peau noire et sont génétiquement bien adaptés à une exposition forte aux UV solaires. Mais ils sont aujourd’hui très minoritaires, un peu comme les indiens aux USA.
La population Australienne, majoritairement blanche, est aujourd’hui composée de descendant de… forçats Anglais. Et les Anglais, surtout quand ils ont la peau pâle, les cheveux blonds ou roux, des tâches de rousseur, font partie des populations qui peuvent présenter ce fameux variant du gène MC1R.
Voici un extrait d’un livre publié en 1885 qui relate l’histoire des premiers colons blancs de l’Australie :
« Il y a une centaine d’années, un transport de « convicts », c’est-à-dire de forçats, débarquait à Botany-Bay et formait les premiers éléments de la Nouvelle-Galles du Sud. Un peu plus tard, un autre convoi prenait la route de la terre de Van Diemen, aujourd’hui appelée Tasmanie. Ce sont bien là les premiers Australiens à peau blanche avec quelques fonctionnaires chargés de les garder. »
Et un peu plus loin : « Alors ont débarqué sur la terre promise, des Anglais de toute catégorie ; ceux-ci ont apporté de l’argent, ceux-là leurs bras et leurs facultés, tous sont venus avec des espérances sans limite ».
Et ces colons Anglais n’ont pas apporté que leurs espérances sans limites, ils ont également apporté leur gène MC1R, donnant en héritage à leurs descendants le fléau du cancer cutané sur des organismes pas du tout adaptés au soleil Australien.
Références :
- Cust AE, Goumas C, Vuong K, Davies JR, Barrett JH, Holland EA, et al. MC1R genotype as a predictor of early-onset melanoma, compared with self-reported and physician-measured traditional risk factors: an Australian case-control-family study. BMC cancer. 2013;13:406.
- L’Australie, description du pays: colons et natifs, gouvernement …Ferdinand Journet. 401 pages. J. Rothschild Editeur, Paris, 1885. (pages 50-51).